VERSUS : Allons de l’autre bord (Luc 8/25)

Par Benjamin GABELLE, prédicateur dans l’assemblée de Wasselonne (67)

Ce que la Bible dit : « Puis il leur dit : ‘Où est votre foi ?’ « 

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Ce que la Bible ne dit pas : « Puis il leur dit : ‘Grande est votre foi !’ « 

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Très étonnante cette parole de Jésus, ne trouvez-vous pas ? Si étonnante qu’elle semble même contradictoire avec l’expérience que viennent de faire les disciples. Rappelez-vous.

Jésus et ses disciples traversent tranquillement la mer sur un bateau de pêche dans le repos de la nuit. Jésus est exténué de sa journée mais serein, il s’endort. Dans cette région, la météo est très capricieuse et la mer d’huile se transforme rapidement en tumulte. Une tempête d’une grande violence s’abat sur le bateau qui commence à se remplir d’eau, mettant la vie de tout l’équipage en grand danger. Certains des disciples présents sont des pêcheurs de métier et connaissent donc la navigation, mais même eux ne réussissent pas à prendre le dessus. Lorsque même les professionnels sont impuissants, la panique commence à s’installer.

Certainement que personne ne souhaite réveiller le maître : il paraît si paisible. Il dort si bien que le fracas de la tempête ne semble pas influer sur la profondeur de son repos. Mais là, il faut le réveiller, c’est la dernière chance, ne serait-ce que pour élever ensemble une dernière prière avant de périr au fond de l’eau.

Les disciples sont, bien sûr, motivés par autre chose. Ils ont vu Jésus faire des miracles. Même s’il est difficile de s’habituer à l’extraordinaire, ils commencent à comprendre qu’ils suivent un homme aux pouvoirs hors normes. Il a multiplié de la nourriture, il pourra sûrement faire quelque chose pour toute cette eau, tout ce vent. C’est peut-être par une dose égale de désespoir et de foi qu’ils réveillent Jésus.

Jésus se réveille, il est sûrement somnolent, mais comprend la situation. En une phrase, le calme revient et le voyage peut se terminer comme il a commencé : paisiblement. Avant de retourner se coucher, Jésus se tourne vers les disciples ahuris et leur lance un magistral « Où est votre foi ? »

Alors, qu’en pensez-vous ? Jésus n’aurait-il pas dû féliciter les disciples d’avoir eu le bon réflexe, celui de venir chercher secours auprès de lui ? N’est-ce pas cela la foi, crier à Jésus dans la tempête ? Pourtant, c’est tout le contraire, Jésus semble remettre en question la foi de ses amis.

Pour comprendre, peut-être faut-il considérer avec attention une petite phrase de Jésus qui a déclenché toute cette aventure :

« Allons de l’autre bord » (Marc 4/35).

Quand Dieu prévoit, il pourvoit. Avant même d’avoir quitté la terre ferme, Jésus savait déjà que le bateau verrait l’autre bord. On comprend peut-être mieux ce reproche de Jésus.

Les disciples l’ont réveillé car ils avaient peur de mourir (Matthieu 8/25). Plus tard, Jésus enseignera que pour porter du fruit, « le grain doit tomber en terre et mourir » (Jean 12/24). Peut-être que l’expérience de la traversée d’une tempête en faisant la sieste avec Jésus nécessite une foi plus grande (ou mieux dirigée) que l’expérience d’une tempête qui est calmée au moment même où elle commençait son œuvre.

Quelque chose devait mourir dans cette tempête. Les disciples n’étaient pas au bout de leur surprise, leur apprentissage ne faisait que commencer.

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