Mon histoire – Christelle & la trisomie 21
« C’est un œuf de mauvaise qualité ; quand vous accoucherez, on va laisser faire la nature.«
Ces terribles paroles ont été prononcées par mon professeur de gynéco-obstétrique qui a sur sa conscience -ce sont ses propres paroles- plus de 300 000 IVG (Intervention Volontaire de Grossesse), lorsqu’il m’a confirmé la trisomie 21 de ma fille, juste avant sa naissance…
Eh oui ! « La trisomie, ou on l’élimine avant la naissance, ou on vit avec », confiera une mère.
Quand Christelle est née, on l’a emportée immédiatement loin de nous, mon mari et moi. Pas de cri, un silence interminable : « Ça y est, la nature a fait son œuvre, elle est morte… », pensais-je. Mais quelques minutes plus tard, la voilà, notre fille, posée sur moi et prenant sa première tétée ! Oui, elle est là, bien vivante ! Quelle joie ! Un verset de la Bible que je connais bien, se détache ce jour-là, en lettres de lumière sur le mur : « À chaque jour suffit sa peine« (Matthieu 6/34). Comme si le Seigneur me disait : « Ne t’inquiète pas, je prendrai soin d’elle chaque jour de sa vie ».
Face à ma fille « différente », je ne veux pas être le médecin avec ses connaissances sur toutes les incapacités liées à la trisomie 21, mais simplement une maman qui veut l’aider à grandir et à être autonome. Je me sens tellement démunie, maladroite devant ce petit corps tout flasque. J’ai l’impression que le monde s’écroule sous mes pieds, je me pose mille questions sur son avenir. Chaque jour, je prie, je pleure, suppliant le Seigneur de venir à mon aide, m’appuyant sur la promesse qu’il m’a faite le jour de la naissance.
« Si cette enfant est là, c’est que vous êtes une belle et bonne famille. Ayez confiance en vous et tout ira bien. Vous avez un message à apporter aux autres.«
Quelles paroles défiantes de la part d’un kinésithérapeute rencontré peu de temps après la venue au monde de notre fille ! Et nous avons décidé ensemble, mon mari et moi, de relever ce défi.
Il a fallu ensuite annoncer le handicap de Christelle à son frère et à ses deux sœurs ! « Au secours, Seigneur, aide-moi à trouver les mots justes et appropriés ! »
Voici notre dialogue :
« Vous savez que notre corps est constitué de cellules et que dans chaque cellule se trouvent 46 chromosomes constitués d’ADN, qui renferme notre code génétique et détermine ce qui nous caractérise, comme la couleur des yeux et des cheveux, notre degré d’intelligence, etc. C’est comme si chaque cellule est un ordinateur avec 46 programmes différents. Christelle a un chromosome de plus que vous.
– Mais maman, c’est super !
– Euh, pas tout à fait… Le 47e se comporte comme un virus et va perturber tous les autres programmes de l’ordinateur. Elle sera certainement moins belle que vous, moins intelligente que vous, moins… Elle aura plus de difficultés que vous pour gérer sa vie au quotidien. Il va falloir que vous l’aidiez et que vous l’aimiez comme elle est. »
Le chromosome surprise, le 47e, n’est pas ce qu’elle EST, mais ce qu’elle A : il s’est invité sans qu’on s’y attende et il va falloir composer toute la vie avec sa présence.
Une année, pour la fête de Noël, nos trois grands nous ont fait un cadeau dont je me souviendrai toute ma vie : « On a mis nos sous ensemble, et on a commandé pour vous un menu gastronomique dans un grand restaurant, et voici en plus de quoi vous payer deux places au cinéma après. Prenez votre temps, ne vous inquiétez pas, nous garderons Christelle pendant ce temps ! ». Je vous avoue que je n’ai pas pu profiter pleinement du délicieux repas, tellement ma gorge était serrée par l’émotion et la reconnaissance !
Oui, ma vie est super et tellement riche de cette histoire qui caractérise notre famille ! Nous sommes soudés et je suis quelqu’un de privilégié.
Le regard des autres était ma plus grande crainte ; j’ai supplié le Seigneur de me donner la force d’affronter ce regard. Il a exaucé ma prière. Oui, maintenant je suis fière de montrer ma fille.
Il a fallu aussi faire le deuil de « l’enfant rêvée », arrêter de faire la projection de ce qu’aurait pu être notre vie de famille si Christelle n’avait pas été en situation de handicap. Elle est vraiment celle que le Seigneur nous a confiée, en sachant que nous sommes capables, par sa grâce, de relever le défi…
Plutôt que d’envisager les incapacités de Christelle, je veux l’aider à développer ce dont elle sera capable dans la vie. Son évolution est lente, ses progrès modestes ; il a fallu s’adapter, ne pas mettre la barre trop haute, ne pas comparer ses progrès à ceux des autres. J’ai appris à revoir à la baisse mes ambitions, à devenir plus humble et à être moins exigeante vis-à-vis d’elle, des autres et de moi-même…
La scolarité a été également un véritable parcours du combattant. Actuellement, Christelle travaille à temps plein dans un ESAT (Établissement et Service d’Aide au Travail), elle est très fière de nous montrer son bulletin de salaire chaque mois, « comme tout le monde » !
Christelle a accepté Jésus dans sa vie, est passée par les eaux du baptême. Elle joue du tambourin et sert le Seigneur dans l’église aux services d’accueil et de Sainte Cène. Et surtout « il faut que je lise ma Bible chaque jour et que je téléphone au Seigneur, c’est la priorité ! »
Je suis très vite passée de « Pourquoi moi, c’est injuste ! » à « Pourquoi pas moi ? ». Dieu dans sa richesse infinie, sait se manifester de telle sorte que « Toutes choses concourent au bien de ceux qui aiment Dieu« (Romains 8/28), même le handicap !
Merci Christelle, pour les leçons de vie que tu me donnes !
Merci Seigneur pour les cadeaux insoupçonnés de la différence !
A retrouver dans le Dossier Handicap : Anormalité ou richesses divine ? de février 2022
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